Je m’appelle… « Ville de Brest »

 

 

Des larmes de sang coulent sur les joues de mes pétales couleur de feu, le feu des bombardements de la ville de Brest au cours de la seconde guerre mondiale. Mon nom ? "Ville de Brest".

 

Je suis une création de Jean-Marie Gaujard, rosiériste-obtenteur à Feyzin (près de Lyon) dont l’ancêtre était jardinier en chef des jardins de Versailles auprès de Le Nôtre sous Louis XIV, en mémoire de la pluie de fer qui s'est abattue sur Brest au cours de la seconde guerre mondiale. Cette pluie qu’évoque Jacques Prévert quand un jour de l'année 1944 il descendait rue de Siam à côté d'une jeune fille, appelée par son amoureux blotti dans l'encoignure d'une porte d'immeuble, alors que les sirènes annonçaient un nouveau bombardement. Barbara ! Barbara !

 

Qu'est-elle devenue ?

 

...Une chanson...témoin de ces bombardements incessants entre 1940 et 1944 qui ont entraîné la destruction totale ou partielle de 14.500 bâtiments sur 16.500 à l'époque et 1500 à 2000 victimes recensées...et combien d'autres ?

 

Témoin, je le suis aussi comme un symbole, après avoir obtenu un 3ème certificat de mérite en 1942 sous le nom "Ville de Brest" car du  mérite et du courage il en a fallu à la population soumise aux hurlements des sirènes et le ronronnement des moteurs d'avions, annonciateur du déluge de bombes qui s’abattaient sur la ville, entraînant la mort et la désolation des vivants...

 

Ma création est en lien direct avec le parrainage de Brest par la ville de Lyon, intervenu le 4 décembre 1941 à l'initiative du chanoine Courtet, curé de l'église Saint-Louis de Brest. Lyon a adopté la ville de Brest comme filleule de guerre pour l’aider financièrement à se reconstruire après 1945. Il n'est donc pas surprenant de trouver une rue de Lyon à Brest et à Lyon une rue de Brest dans le 2ème arrondissement.

 

Pourquoi une rose comme symbole de la guerre ? Dans la religion chrétienne, la rose est le symbole de l'expression du martyre et du sang du Christ. Le sang, celui de toutes les victimes de la guerre, des martyres qui furent trop nombreux sous les bombardements comme le dernier maire de la commune de Saint-Pierre Quilbignon, Victor Eusen, mort le 9 septembre 1944 dans l'explosion accidentelle de l'abri Sadi-Carnot, président de la Délégation Spéciale de Brest.

 

Plus de soixante-dix ans se sont écoulés dans l'ignorance quasi générale de mon existence, cultivée depuis 2009 aux rosiers du Berry à Loye-sur-Arnon après avoir vécu... ma « captivité » en Allemagne à la roseraie Sangerhausen ! Je retrouve aujourd'hui avec bonheur la terre de mes racines culturelles afin d’y fleurir les jardins et balcons, dans le souvenir du passé qui est toujours présent dans la mémoire collective.

 

L’Antiquité fixe l’origine de la rose à la mort d’Adonis, l’amant d’Aphrodite déesse grecque de l’amour et de la beauté. C’est à partir de cet évènement dramatique que la rose est devenue le symbole de l’amour...

 

Par les circonstances tragiques de la guerre, je suis devenue aussi le symbole de la solidarité entre les hommes mais…"quelle connerie la guerre", comme l'écrit Jacques Prévert dans sa chanson Barbara ! 

 

Gérard Bellec

 

Trois quart de siècle après la seconde guerre mondiale l'histoire ouvre une de ses pages, écrite du sang des victimes des bombardements de Brest, celle d'un symbole né sur les décombres d’une ville en ruine.

 

Symbole d’espérance mais aussi emblème de la résistance d’une population sinistrée, en 1942 une rose fut baptisée "Ville de Brest", dans le cadre du parrainage de Brest par la ville de Lyon pour l'aider à financer sa reconstruction et venir en aide aux sinistrés. Elle en est le magnifique symbole de solidarité.

 

 

"La diagonale...de la solidarité". Livre édité par l'association Rose ville de Brest. Prix 9,80€